Vers une autonomie stratégique de l’Europe en matière de défense ?

Vers une autonomie stratégique de l’Europe en matière de défense ?

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Durant la Guerre froide, l’Europe de l’ouest, alors en pleine construction européenne, a entamé un processus de défense de l’Europe en co-fondant l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) en 1949.  Sous la tutelle des États-Unis, les États d’Europe de l’Ouest ont cherché à mettre en commun leurs capacités militaires, stratégiques et opérationnelles. L’objectif principal était de coopérer en cas d’attaque venue de l’Union soviétique. Six pays – République fédérale d’Allemagne, Belgique, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas – ont fondé la Communauté européenne de la défense (CED) en 1952, avec pour objectif de créer une armée européenne et des institutions supranationales sous le commandement de l’OTAN. Ce projet a échoué suite au vote négatif de l’Assemblée nationale en France.

Après la Guerre froide, dans les années 1990, les enjeux géopolitiques changent, notamment dans les Balkans après l’éclatement de la Yougoslavie. C’est au cours des guerres d’ex-Yougoslavie que l’Union européenne (UE), née en 1992 après le traité de Maastricht, élabore sa politique étrangère et de sécurité commune (PESC). Face à l’éloignement progressif des États-Unis vers d’autres terrains d’affrontements en Asie, elle affiche pour la première fois sa volonté de créer une autonomie stratégique et défensive de l’Europe. Les objectifs principaux sont le maintien et le rétablissement de la paix, ainsi que des missions humanitaires et d’évacuation, grâce à une mutualisation des capacités militaires. Cependant, cela ne signifie pas une indépendance par rapport à l’Alliance atlantique et à l’ONU, mais des opérations avec l’aide de ces organisations. En effet, en ce qui concerne l’armement, l’UE a des difficultés à créer des coopérations. 

C’est grâce aux relations bilatérales, surtout franco-britanniques, qu’une politique concrète de défense européenne trouve son impulsion. Le traité de Saint-Malo, en 1998, permet à la France et au Royaume-Uni de coopérer plus tard sur des fronts communs comme la Libye. Différents accords rendent possible une coopération en matière de renseignement, de commandement, d’armement dans les années 2000. Ce traité marque le début d’une Europe de la sécurité et de la défense, sous l’impulsion des deux grandes puissances. 

En décembre 1999, le Conseil européen d’Helsinki renforce considérablement les moyens militaires, par la création d’une force permanente de 60 000 hommes en Bosnie et d’organes militaires et politiques au niveau de l’UE. Ainsi, à la fin du XXe siècle, la défense de l’Europe prend un tournant également institutionnel. Chaque étape de la défense de l’Europe s’accompagne désormais de nouvelles institutions. 

De plus, pour la première fois, l’UE remplace l’OTAN pour une mission de maintien de la paix en 2003, en ancienne République yougoslave de Macédoine.

Les tensions entre la France et les États-Unis entre 2003 et 2007, les désaccords entre les États européens au sujet du soutien aux Américains dans la guerre en Irak et le traité de Lisbonne ont ralenti le processus de défense européenne. La réintégration de l’OTAN par la France en avril 2009 confirme cette tendance de défense de l’Europe qui ne fonctionne pas sans l’OTAN. 

Signe tout de même de l’importance d’une politique européenne de sécurité et de défense, l’agence européenne de défense (AED) est créée pour rassembler les différents organes de défense et de sécurité.

Dès son élection en mai 2017, le président français Emmanuel Macron soutient la « refondation d’une Europe souveraine, unie et démocratique » et qui « garantit la sécurité dans toutes ses dimensions ». Lors de son discours sur l’Initiative pour l’Europe, du 26 septembre 2017 à la Sorbonne, il défend la mise en place notamment d’un fonds européen de défense et d’une coopération structurée permanente (CSP).

La CSP rassemble vingt-cinq États européens qui se sont engagés à mettre en commun leurs capacités militaires et opérationnelles. Quarante-six projets ont déjà été lancés dans ce cadre, par exemple « EU Radionavigation solution » (EURAS) pour géolocaliser des forces et agir avec précision, grâce à Galileo. Le fonds européen de défense, lancé en 2017, vise l’acquisition en commun de matériel et de technologies et le développement de projets, pour « soutenir l’industrie et réduire l’indépendance à l’égard des États-Unis. » La décision, pendant l’été 2020, de consacrer au budget de la défense 7 milliards au lieu de 13 milliards d’euros pour la période 2021-2027, a fait controverse. Quoi qu’il en soit, ce budget, la CSP et les nombreuses institutions politiques et militaires contribuent à un véritable projet de défense communautaire.

C’est dans cette capacité de créer de nombreux projets que l’Union européenne peut acquérir une autonomie stratégique.

Sources:

https://ehne.fr/fr/encyclopedie/th%C3%A9matiques/relations-internationales/organiser-le-syst%C3%A8me-international/la-france-l%E2%80%99alliance-atlantique-et-l%E2%80%99europe-de-la-d%C3%A9fense-depuis-la-fin-de-la-guerre-froide

https://www.defense.gouv.fr/dga/international2/historique-de-la-construction-europeenne-de-la-defense

https://www.cairn.info/revue-relations-internationales-2006-1-page-59.htm

https://www.defense.gouv.fr/actualites/international/la-csp

https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2017/09/26/initiative-pour-l-europe-discours-d-emmanuel-macron-pour-une-europe-souveraine-unie-democratique

https://www.lemonde.fr/international/article/2020/07/25/le-budget-de-securite-et-de-defense-europeen-victime-du-fonds-de-relance_6047272_3210.html

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