Le pacte de la Société des Nations, rétablir et maintenir la paix par le droit international

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 Au lendemain des deux guerres mondiales, les États tentent d’imposer la paix à l’échelle mondiale par l’institutionnalisation politique et juridique d’une communauté mondiale. D’abord la Société des Nations (SDN) puis l’Organisation des Nations-Unies sont pensées et mises en place dans le même dessein : créer un ordre mondial pacifique qui s’inscrit dans un temps long. Ces institutions internationales sont fondées par des traités élaborés en vertu du droit international et reflétant les projets de paix que les États signataires voulaient édifier. Ces textes juridiques établissent les principes et les conditions selon lesquels la paix adviendra et qui permettront d’éviter l’état de guerre.

La création de la Société des Nations au lendemain du premier conflit mondial répond à cette nécessité de reconstruire un ordre mondial pacifique. Le cadre politico-juridique qu’elle constitue pour les relations internationales est pensé selon un principe d’égalité entre les Nations, rassemblées dans une association à vocation universelle et non-contraignante, telle que l’expose le président Wilson dans son adresse au Sénat des États-Unis du 8 février 1918.

Le pacte de la SDN est inclus dans le traité de Versailles. Ratifié en 1920 par l’Allemagne vaincue, il entre en vigueur la même année. Ce pacte prévoit la création d’une institution reposant sur deux entités principales, l’Assemblée et le Conseil. Chaque État est représenté à l’Assemblée par un unique fonctionnaire qui dispose d’une voix. Des secrétariats composés de centaines de fonctionnaires et discutant de thèmes multiples tels que le trafic d’armes ou la traite humaine le succèdent. Le Conseil est quant à lui composé d’une part de cinq membres permanents, les vainqueurs de la guerre, la France, l’Italie, la Grande-Bretagne, le Japon et la Chine, après le refus que le Sénat des États-Unis refuse de le ratifier. Les membres non-permanents complètent le Conseil, d’abord quatre, leur nombre de sièges est successivement élargi. Les décisions votées à l’unanimité dans ces deux groupes ne sont que consultatives. La bonne volonté des États membres est alors la seule garantie d’application des mesures décidées en commun par ceux-ci.

Porteur de l’esprit pacifique qui s’impose pendant les années 1920, le pacte de la SDN tient toutefois compte des réalités contemporaines de l’immédiat après-guerre. D’une part, les remaniements territoriaux et la modification des frontières dans différentes régions du monde, dans les Balkans par exemple, ont fait émerger la question des minorités nationales parfois ignorées par ce nouveau découpage territorial. Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes est une idée qui s’impose progressivement et dont la SDN se veut la garante. Cependant, la réalisation de cet idéal universel se heurte à la complexité des procédures administratives et à la dispense d’application sur leurs territoires coloniaux dont jouissent certains États-membres. Si les « dominions » coloniaux peuvent rejoindre l’Assemblée de l’organisation internationale, la distinction entre les nations civilisées dotées d’une « mission sacrée de civilisation » et les nations encore « habités par des peuples non encore capables de se diriger eux-mêmes » (Article 22) demeure.

La guerre est désormais à éviter. Il s’agit tant d’établir les conditions censées maintenir la paix, que de prévoir l’encadrement juridique de la guerre en cas d’échec des procédures pacifiques. Lorsqu’un différend oppose deux ou plusieurs États-membres, sa résolution doit emprunter les procédures prévues par le traité, c’est-à-dire le règlement diplomatique (Article 13), la procédure à l’arbitrage ou encore l’examen du Conseil. La voie judiciaire doit empêcher l’avènement de l’état de guerre. Plusieurs litiges se sont ainsi résolus, à Corfou, entre la Grèce et l’Italie, ou encore dans les îles Åland, entre les minorités suédoises revendiquant plus d’autonomie et le gouvernement central finlandais. Cependant, il convient de nuancer le casus belli et le véritable risque de guerre que représentaient ces différends. D’autre part, la distinction est posée entre guerre licite et guerre illicite puisque les affrontements armés sont aussi pensés dans le pacte de la SDN. En effet, la légitime défense est toujours considérée comme un motif de guerre acceptable. La menace extérieure est pensée comme commune à tous les États-membres ipso facto, qu’elle ne concerne directement qu’un État ou plusieurs. Cependant, cette organisation internationale n’ayant qu’une dimension contraignante, elle ne constitue pas une alliance politique ou militaire. De ce fait, les mesures prises en réponse à toute infraction condamnée par la SDN n’étaient pas nécessairement mises en œuvre. Lors de la création de l’État fantoche du Mandchoukouo par le Japon impérial, aucune sanction n’est appliquée à l’égard du pays condamné.

Finalement, des traités bilatéraux entre les nations sont signés en dehors du cadre de la Société des Nations. Les États-Unis, qui ne sont pas membres de la SDN, et la France d’abord en 1928 et plus d’une soixantaine d’autres États plus tard signent le Pacte Briand-Kellogg, ou pacte de Paris. Ce traité « [condamne lui aussi] le recours à la guerre pour le règlement des différends internationaux et y renoncent en tant qu’instrument de politique nationale dans leurs relations mutuelles ».

Si la critique a posteriori de l’institutionnalisation embryonnaire de la communauté internationale est aisée au prisme de l’ordre mondial contemporain, la Société des Nations permit l’avènement d’un idéal débattu dès le XVIIème siècle par les philosophes et les juristes. L’ONU, principale organisation internationale contemporaine, en est largement l’héritière.

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